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La face cachée d’un salon du livre

by Jessika
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espace Encan

La face cachée d’un salon du livre : Salon L’encre et les mots – La Rochelle du 12 au 15 novembre 2021

En juillet dernier, j’avais eu le plaisir d’apprendre que mon troisième roman Into Vinceres avait reçu le premier prix de la romance épicée (notez au passage qu’en 2020, l’intitulé du prix était romance érotique. Le mot a été remplacé pour un adjectif plus acceptable, dans un salon de littérature généraliste. Ceci n’est pas une critique, juste une constatation qui vient corroborer le fait que le mot érotisme doit être réhabilité). Heureuse d’être la gagnante (c’était la première fois que mon travail était récompensé), je décidai de prendre un stand pour la durée du salon et de profiter de cette opportunité pour rencontrer mes lecteurs et faire connaître mes écrits. La crise sanitaire m’avait empêchée de participer à d’autres salons et de faire des dédicaces.

Le voyage

J’habite près de Nice. Décollage à 09h05 de l’aéroport pour 1h20 de vol vers Nantes, puis location de voiture et 2 heures de route pour La Rochelle avec deux énormes valises remplies de livres, prêts à être dédicacés.

Tout se passe bien. Aucun retard, ni aléa ne vient perturber notre voyage. Nous arrivons à l’espace Encan 10 minutes avant l’ouverture du salon, prévue le vendredi à 14h00. Un peu stressée, (je n’aime pas être en retard) mon mari me dépose devant le palais des expositions et je me dépêche de m’installer.

J’ai tout prévu pour que mon stand soit attrayant, coloré, et donne envie de s’arrêter. Pour l’occasion, j’ai confectionné un kakémono gigantesque en commettant la grossière erreur d’avoir mis les dates de dédicaces (erreur de débutante car je ne pourrai plus le réutiliser lors d’un autre salon). Mais bon, cela fait tellement longtemps que je n’avais pas pu vivre ces moments de proximité avec les lecteurs, que j’ai oublié de réfléchir…

L’installation

14h, je suis en place et excitée de voir les premiers visiteurs dans cet espace merveilleux avec vue sur les vieux gréments. Mon stand est le 37. Il est idéalement situé juste en face de celui de Cultura qui devrait attirer du monde et j’ai le port juste derrière moi.

La remise des prix

Après un après-midi prometteuse, l’heure de la remise des prix arrive. 18h30, je récupère mon trophée et doit faire un petit discours. Futile et court moment de gloire que je savoure comme une enfant. Je suis la plus vieille des gagnantes. Cela me fait sourire, grand-mère depuis quelques jours et auteure primée pour mon livre, soi-disant épicé, qui risque de monter au nez de beaucoup de lecteurs non initiés.

Quand ton mari oublie de filmer la remise des prix et que c’est trop tard.

Le soir, mon mari et moi, profitons de flâner dans les ruelles de La Rochelle, très charmante ville que nous découvrons pour la première fois.

Le deuxième jour

Un copieux petit-déjeuner et je prends la direction de l’espace Encan qui se trouve à quelques encablures de l’hôtel Ibis Vieux Port où je suis logée. Je suis très motivée mais cet enthousiasme ne va pas durer.

Participer à un salon est un exercice très formateur

Tour à tour, je m’efforce de sourire, saluer et expliquer mon travail, à ceux qui ralentissent devant mon stand. Je me rends vite compte qu’il faut beaucoup, beaucoup, beaucoup parler et souvent pour rien. Il y a d’innombrables stands de toutes sortes, avec un choix énorme et le budget des visiteurs n’est pas extensible. Il faut tenter de se démarquer, de se faire remarquer. On apprend la patience, l’humilité et c’est très formateur.

Le succès des autrices de romance

De plus, la proximité du stand Cultura va bientôt m’apparaître comme un lourd handicap, surtout lorsqu’entrent en scène les auteures phares, invitées par le salon pour des dédicaces très organisées. Emma Green, Laura Black etc… auteures de New Romance s’installent et une queue épaisse (pardon de l’expression) se forme et commence à encombrer les allées, empêchant les autres visiteurs de pouvoir accéder aux stands, voisins, au cas où cela les intéresserait. J’avais déjà pu assister à ces mouvements de foule incroyables au salon de Livre Paris en 2018 et 2019. Cela m’avait presque rendue jalouse et en même temps, j’étais fascinée par ce succès qui faisait rêver la petite autrice que j’étais.

Le mot érotisme serait-il devenu un gros mot?

Je réalise quelques ventes mais je constate que c’est très difficile d’accrocher de nouveaux lecteurs, surtout dans un salon générique. Commencent alors une série de déconvenues, de réflexions et de revers de médaille.

Après un long moment à expliquer mes ouvrages, une dame me dit : désolée mais j’ai déjà trop de livres à lire… Une autre qu’elle n’a plus de budget… Un couple passe, lui lorgne mon stand avec un certain intérêt, elle, le pousse vers le stand jeunesse juste à côté. Une lectrice reste une éternité en pâmoison devant les escarpins que j’utilise comme porte marque-pages sur ma table. Certainement une marchande de chaussures ! Une suivante semble ralentir et s’intéresser à mes romans. Je luis demande si elle connaît la littérature érotique. Elle ouvre de grands yeux ébahis et s’enfuit en marmonnant une phrase inintelligible qui semble traduire un outrage. Au fil de la journée, je fais un amer constat, le mot érotique est devenu un gros mot.

Les gens sont de plus en plus frileux

Je me dis qu’il faut agir, que je ne peux pas rester les bras croisés alors que nous sommes au XXIème siècle et que le sexe reste encore un tabou. La société est bien muselée que ce soit dans l’humour, la littérature et de manière plus générale dans l’art. Pourtant, pour moi, la crise sanitaire avait contribué à une envie de lâcher prise, d’évasion, de découverte, de renouveau. Je me trompais. Les lecteurs, comme tous les autres consommateurs, ne s’aventuraient pas vers l’inconnu.

Les gens sont de moins en moins curieux

Ils préféraient se référer aux grands noms et même dans des salons comme celui de La Rochelle, où les petits auteurs étaient représentés en nombre, ils se jetaient sur les ouvrages de Marc Lévy, guillaume Musso, Amélie Nothomb, de Valérie Perrin, au stand Cultura. Les gens consomment tous les mêmes produits et sont de moins en moins curieux. Il n’y a qu’à comparer avec l’industrie du parfum. Chez Sephora, il y a une dizaine de marques qui se partagent les ventes. Nous sentons les mêmes effluves, nous lisons les mêmes livres.

Des lecteurs adorables

Fort heureusement, certains lecteurs que je ne n’avais jamais rencontré, excepté par l’intermédiaire des réseaux sociaux, sont venus me saluer et compléter leur collection. Une amie chroniqueuse a pris la peine de m’apporter des petits cadeaux et sa visite m’a redonné le moral. Malgré le fait d’être cataloguée, mise dans une case discriminatoire, qu’on soit infréquentable, parce qu’on ose écrire de la romance érotique, on fait toujours de belles rencontres dans les salons et on apprend beaucoup de choses. Moi, tout ce que j’ai fait, je l’ai fait toute seule. J’ai fait des erreurs et je l’assume. Et c’est le 3ème jour que je vais réaliser qu’écrire est une chose, mais l’emballage en est une autre et c’est très important.

Le troisième jour

Tous mes collègues des stands environnants ont le moral dans les chaussettes. La cause : les séances de dédicaces de New Romance qui se poursuivent tambour battant et concentrent tous les visiteurs sur les mêmes stands. Positive, je me dis que ce que j’écris n’est pas si éloigné de la romance, peut-être un brin plus épicé, et encore, je n’en ai jamais lu donc pourquoi ne pas tenter ma chance et faire une percée dans le troupeau compact qui attend pour avoir sa dédicace. Je parviens à capter l’attention de certaines lectrices qui semblent conquises par mes explications. Cet engouement me rassure. En effet, il est le gage d’un lectorat potentiel prometteur. Faut-il trouver le bon angle d’attaque?

Laura Black

Puis, lorsque le calme revient, Laura Black vient me voir pour prendre une photo de moi sur mon stand. Je trouve cette approche très sympathique. Nous échangeons et je commence à comprendre pourquoi mes romans attirent moins que les siens. Tout est une question de couverture, de titre, de marketing. Et je me prends à refaire le monde! Avec des si, peut-être qu’il y aurait aussi la queue devant mon stand?

Et si les lèvres rouges avaient été publiées sous un autre emballage?

Ou encore, si Into Vinceres n’avait pas un titre en Latin, trop prétentieux, abstrait qui n’évoque rien à personne?

Enfin, si Jessika Lombar avait choisi un pseudo anglais?

Vendre son âme au diable?

Pourquoi en avoir honte? L’objectif de chaque auteur n’est-il pas d’être lu par le plus grand nombre? Et au fond, on a beau s’en défendre et répéter que l’on écrit par passion. Certes! Mais si on pouvait en vivre, ce serait encore mieux! En tous les cas, j’ai adoré parler avec cette autrice de romance et j’ai une nouvelle fois beaucoup appris en échangeant avec des professionnels du livre.

Le bilan de la face cachée du salon du livre

En conclusion, voici ce que je retire de cette expérience : enrichissement personnel, convivialité, humour, rencontres, expérience inédite, une interview avec la blogueuse du salon Justmademoiselleblue, et une résolution : me faire offrir une liseuse à Noël pour lire des romances et comprendre les rouages de tant de succès.

Si vous avez aimé cet article, n’hésitez pas à le partager. J’aimerais bien avoir vos commentaires sur les couvertures qui auraient pu remplacer les miennes. Est-ce que vous les trouvez plus attirantes? j’attends vos avis avec impatience…

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1 Commentaires

Yves CHONIER 16 décembre 2021 - 11h53

Personnellement, je préfère Jessika Lombar à Amel Rose, et un titre en Latin (dont je dois faire un effort pour comprendre le sens) éveille plus ma curiosité qu’un titre an Anglais.
Alors, il ne faut rien changer, d’autant plus que ce que je retiens de la lecture de cette « face cachée » c’est que, globalement et si l’on excepte le « coup de blues » du samedi, tu as tiré des points positifs de ce salon. Tu y as appris des choses, et c’est important.

Pour le samedi, tu étais un peu le petit pot de terre qui habitait en face de l’énorme pot de fer, et ce n’est pas une position très confortable, mais tu y étais et c’est ça qui est important.
Je suis habitué à d’autres types de salons, techniques, ou mon entreprise n’est qu’un petit sous-traitant, j’y suis donc une position semblable à la tienne face à Cultura. Dans ce type de salons, même si les géants du secteur font toujours des annonces mirobolantes, ce n’est pas là qu’on fait des ventes, on y est pour montrer qu’on existe, qu’on est « vivant » et qu’on produit des choses intéressantes. Mais est-ce la même chose pour un salon du livre ? Combien y a-t-il de visiteur qui iront acheter tes livres après coup ? Ça, je l’ignore.
Enfin, pour le fait d’écrire ou simplement de lire des ouvrages érotiques, c’est un autre sujet… Il y aura toujours des gens (dont je fais partie, c’est évident car sinon je n’écrirais pas ici) qui s’y intéresseront, qui aimeront ; et tout un tas de « tartuffes » qui ne sauront que crier « cachez ce sein que je ne saurais voir » sans en avoir jamais lu un seul de leur vie. Et contre ce type de comportement (que je connais bien pour en avoir dans ma propre famille), je ne crois pas qu’il y ait de solution. Le mieux est donc de ne pas s’en préoccuper.

Je te souhaite plein d’autres salons tous aussi enrichissants les uns que les autres.
Yves

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